samedi 26 avril 2014

À deux, c’est beaucoup mieux


Histoire vraie ...
Qu'importe le règlement …
René a 96 ans et sa Geneviève tout juste quatre de moins. C'est ensemble qu'ils ont effectué un gros bout de chemin et rien ne devrait les empêcher de terminer leur parcours également ensemble. Rien, du moins si le règlement ne venait pas se mettre stupidement en travers de leur route …
Après plus de soixante-dix ans de vie commune, les inéluctables dégradations qu'apporte le grand âge peuvent parfois mettre de légers grains de sable dans le bonheur conjugal. Nos deux tourtereaux se voient alors contraints par des enfants, soucieux de leur bien-être, de faire un essai dans une maison de retraite.
Car c'est ainsi qu'on leur présente la chose : un placement provisoire leur permettra de voir si la vie n'y serait pas plus facile. René souffrant du poids des ans , sa mobilité est de moins en moins assurée. Pour Geneviève, atteinte de ce mal cruel qui vous fait perdre la tête, oublier petit à petit le plus clair de vous-même, la dégradation est pire encore
Pas question de les séparer, eux qui n'en n'ont jamais eu l'habitude. René, chef d'entreprise, homme entreprenant, spécialisé dans la galvanoplastie, a mené parfaitement sa barque soutenu qu'il était par une Geneviève toujours à ses côtés. Quand l'heure de la retraite a sonné, ils ont continué à être ainsi, l'un pour l'autre, ce bâton de vieillesse dont aucun ne pouvait se passer.
Alors, quand ils arrivent dans cette maison de retraite de Voulx, ils n'imaginent pas l'impensable. On les oblige à se séparer en faisant chambre à part, à se retrouver l'un sans l'autre au moment de s'endormir. Pour René c'est inconcevable. Pour Geneviève, c'est intolérable, à moins que ce ne soit le contraire …
Les infirmières et le personnel viennent leur apporter des arguments choc : René a besoin de soins médicaux, Geneviève doit rester au calme. Rien n'y fait ; ils ne veulent pas se résoudre à une séparation à laquelle ils n'ont jamais songé. Les deux chambres ont beau être mitoyennes et communiquer par une porte intérieure, le divorce semble consommé entre la maison de retraite et nos deux amoureux.
Geneviève qui n'a pas perdu toute sa tête, se met à protester : dormir sans son René est strictement impossible ! René acquiesce , fait chorus et s'élève contre ce contre-temps plus que fâcheux. On les a trompés, on leur a menti ! L'équipe médicale restant ferme sur les principes, les deux contestataires sont renvoyés chacun dans sa chambre.
Pourtant au petit matin, quelle frayeur pour l'aide -soignante : la première chambre où elle pénètre est vide ! Que s'est-il passé ? Elle ne va pas tarder à découvrir le pot aux roses. Dans l'autre chambre, dans un lit de quatre -dix centimètres de large, deux vieillards côte à côte, dorment main dans la main. Comment ont-il osé défier la règle de la maison ? Que s'est-il passé lors de cette nuit où deux corps étaient si proches ? Mystère et silence dans les rangs.
Le personnel a dû faire contre mauvaise fortune bon cœur. L'amour a ses raisons que le règlement ignore. Il y a désormais dans cette maison de retraite une chambre à deux lits et, dans la pièce voisine, un petit salon. Il a fallu s'adapter à cette évidence : il n'est pas possible de séparer René de sa Geneviève ; le temps n'a eu aucune prise sur leur désir fou de rester l'un à côté de l'autre.
Il n'est aucune morale à cette histoire, simplement la belle et touchante passion de deux êtres qui ne se sont jamais séparés. Au crépuscule de leur aventure, rien ni personne n'aurait jamais dû songer à briser ce lien merveilleux. Ils ont heureusement trouvé les ressources pour s'opposer à la stupidité d'une pratique dénuée d'humanité et de compassion. Ils ont gagné la partie et une fois encore, leur amour est sorti vainqueur.
Amoureusement leur.

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